Jour J
vendredi 1er août 2008 - 4h
Je n'arrive pas à trouver le sommeil... je devrais pourtant dormir encore un peu, la journée qui s'annonce promet d'être longue, éprouvante physiquement et riche en émotions. Elles sont déjà là, ces émotions. J'ai le coeur empreint d'excitation et d'impatience - c'est aujourd'hui que nous devons rencontrer notre petit Samuel, petit bonhomme que nous attendons depuis maintenant 9 mois, après une grossesse riche en rebondissements. Quelques appréhensions traînent aussi au fond de mon palpitant. Cet accouchement, c'est le dernier cap à franchir pour mon petit coeur. Il doit tenir le coup, et je sais que je peux, que je dois "assurer" pour que tout se passe au mieux, et le plus vite possible... Je reste confiante, grâce à gygy... Je sais qu'il lui tient à coeur que tout se passe bien et que je serai surveillée jusqu'au bout pour que tout aille au mieux. J'ai un peu la trouille, aussi, face à ce déclenchement. Moi qui partais pour un accouchement sans péri, forte de l'expérience de mon premier accouchement, je fonçais là droit dans l'inconnu. Le déclenchement a mauvaise presse et les contractions qu'il provoque ont la réputation d'être plus intenses, plus douloureuses, plus rapprochées, d'emblée... pas le temps de s'y faire. Rares sont celles qui résistent à l'appel de la péri. Je me sens donc un peu perdue et je décide de me lever plutôt que de continuer à tourner en rond dans mon lit, et de reprendre mon projet de naissance. Cela fait déjà quelques jours que j'envisage d'opter pour la péridurale. J'irai au bout, à la limite de ce que je peux supporter et je me suis convaincue -tant bien que mal- que la péri ne peut pas ne pas fonctionner une deuxième fois... Sa pose pour mon premier a été un véritable calvaire et alors que je gèrais bien jusque là, cette péri foirée m'avait coûté cher par la suite... D'où mon appréhension.
7h
Je téléphone à la clinique, comme prévu. Les sage-femmes ont eu une nuit très agitée et m'annoncent que je vais devoir patienter jusqu'à 8H30. Je ne tiens plus en place. J'ai hâte d'y être.
8H15
Nous voilà devant la clinique. Grand moment d'émotion. Nous sommes excités, un peu anxieux, nous savons que nous allons vivre une grande journée, une grande aventure. J'ai un peu le trac. Comment cela va-t-il se passer? Quand seras-tu là? Papa pronostique un bébé de l'après-midi... je me montre moins optimiste et serais ravie de te voir en début de soirée...
8H30
Voilà Julie qui nous accueille. Elle sera "notre" sage-femme. Je suis un peu déçue et étonnée que Caroline, la sage-femme qui m'a préparée et suivie jusqu'ici, et qui vient rapidement nous voir, n'ait pas insisté pour s'occuper de moi. J'ignore encore à ce moment que Julie est une jeune sage-femme qui débute et que Caroline veille dans l'ombre.
Bref, me voilà en train de lui raconter toute l'histoire. Accouchement difficile sur la fin pour notre premier bb, la péri n'ayant pas fonctionné et bébé se présentant mal. Pour ce deuxième bébé, je reprends tout à zéro: diabète gesta, hypertrophie septale, le coeur de bb doit être bien surveillé. Je lui parle de la péri, de mes appréhensions. Je lui explique que je veux être libre de mes mouvements, le plus longtemps possible.
Elle m'examine. Mon col n'a pas bougé. On appelle gygy qui décide de faire poser le gel pour laisser mûrir le col encore un peu, avant la pose de la perf. Avant ça, on part pour un petit monito d'1/2 heure, histoire de vérifier comment se porte notre petit Sam.
9H30
Le gel est posé, je dois rester sous monito pour au moins encore 1h 1/2. Moi qui ne tient pas en place, je prends mon mal en patience... Papa me lit le journal, on se demande comment tout ça va se dérouler... j'attends, avec impatience, les premières vraies contractions. J'ai bien des douleurs de règles assez fortes, mais cela fait déjà quelques jours... Rien de significatif.
11h
Le monito est impeccable et pas une contraction à l'horizon. Voilà 2 heures que je suis allongée sur la table, je supplie Julie de me laisser faire un tour... Elle me fait promettre de ne pas aller au-delà du trottoir devant la clinique et m'accorde une petite heure. Rdv à midi pour faire le point. Nous décidons de faire le tour du quartier. Les contractions rythment notre petite marche. Nous vérifions: elles sont régulières, reviennent toutes les 3 minutes et sont suffisamment fortes déjà pour que je sois obligée de m'arrêter à chaque fois. Je profite quand même pleinement de ce dernier moment de liberté avant de retourner à midi pile, en salle de naissance.
12h
Julie m'annonce que gygy est passé me voir pendant notre absence, et qu'il était content de savoir que j'allais bien. Elle ne vérifie pas mon col et m'installe pour un nouveau monito. Si le travail n'est pas commencé, j'aurais le droit à un repas pour tenir le coup. Caroline me précise qu'il ne faut pas envisager la pose de la perf avant 14 ou 15h... Et encore, je dois m'estimer chanceuse, pour un premier bb, on compte la journée. ça, ça a le don de me déprimer...
Nous passons donc une heure, bercés par le doux galop du coeur de petit Sam... Le ryhtme est parfait. Du coin de l'oeil, je surveille le tracé de droite qui suit mes contractions. Chéri chronomètre: 1 minute 14 secondes entre chaque contraction... C'est à cela que sert le chrono sur les montres de nos hommes... Elles sont à présent franchement douloureuses... Et c'est d'autant plus ennuyeux que je ne peux pas bouger, sanglée que je suis à mon monito...
Ma musique préférée: REC001
13h
"Eh bien ça contractouille" me lance Julie après avoir vérifié le tracé. Imaginez ma déconfiture. Elle m'annonce que je vais pouvoir manger. Moi, je lui précise que c'est franchement douloureux et que la dernière chose dont j'ai envie, c'est bien de m'alimenter... Elle ne me connaît pas suffisamment pour savoir que j'ai tendance à minimiser la douleur et que je suis loin d'être douillette. Elle insiste: avec mon diabète et un déclenchement qu'il faut prévoir sur la durée, je vais avoir besoin d'énergie. Apparemment, il est toujours inutile de vérifier où en est mon col. Après tout, il ne s'agit que de le faire "mûrir"... Moi, je préfère ne pas demander, de peur d'être déçue...
J'envoie donc mon homme manger un morceau... Lui, il me connaît un peu et hésite. Il ne veut pas manquer la naissance de son fils. Je lui précise qu'on n'en est visiblement pas là, qu'il se berce d'illusions s'il s'imagine que je suis sur le point d'accoucher. La perf n'est même pas encore posée!
Les contractions redoublent d'intensité, elles sont très douloureuses. J'essaie toutes les positions imaginables pour pouvoir les supporter tant bien que mal et je maudis ce fichu gel de me causer tant de souffrances. Cette fois, je suis résolue à demander le kit 2 en 1: perf et péri en duo. Si le gel provoque de telles contractions, je ne veux pas savoir ce que seront celles qui pourraient suivre... Je me concentre. Chaque contraction doit ouvrir ce fichu col... Je gère comme je peux, mais très vite plus aucune position ne me soulage. A chaque contraction, je me retrouve accroupie, agripée à tout ce que je peux trouver, concentrée sur cette douleur qui doit faire son oeuvre... C'est donc accroupie devant la porte des toilettes que mon homme me retrouve à 13H40.
13H40
J'ai encore plusieurs contractions sur le chemin du retour vers ma salle de naissance, qui n'est pourtant qu'à 3 ou 4 mètres de là. J'avoue que l'idée que Sam pouvait naître là, dans le couloir, m'a effleurée. Mais je me reprends... Je suis toujours dans l'optique de la pose du gel puis d'une perf qui n'est pas encore posée! Je pourrais m'estimer heureuse si je suis dilatée à 5 cm tt à l'heure quand Julie m'examinera. D'ailleurs, je demande à mon homme de l'appeler tout de suite. J'ai besoin d'un bon bain, dernière planche de secours... je sais déjà que je ne pourrais pas en supporter beaucoup plus.
14H00
Julie me prépare la baignoire avec le plus grand soin... Elle me propose même de choisir le parfum alors que je m'en tape comme de l'an 40! Moi, je suis à côté, pliée en deux ou accroupie et j'essaie de ne pas laisser la douleur me submerger... C'est parti pour un bon bain chaud saveur lavande... Avant d'entrer dans la baignoire, je lui demande quand je vais pouvoir prétendre à la péri... Elle me dit: "3 cm ce serait bien..." Ok, c'est entendu... après ce fichu bain, on verra où j'en suis et je prie pour être au moins à 3 cm, histoire de pouvoir réclamer cette maudite péri...
14H20
J'entre dans la baignoire... Pour découvrir très rapidement que cela ne change pas grand chose... Les contractions sont atrocement vives, intenses et rapprochées. Elles se succèdent par vague de 2 ou 3. Le bain ne me sera d'aucun secours. Je demande à mon homme de rappeler Julie, viiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiite. J'ai à peine l'énergie de lui expliquer que ces contractions-là, je les connais, elles ressemblent vraiment à s'y méprendre à celles que j'ai connues au moment de la naissance de Noah. A la fin du travail, au moment de pousser! J'ai atteint ma limite, je n'en supporterai pas plus! D'ailleurs, il me faut un temps fou pour sortir de la baignoire, le répit est toujours de très courte durée. Une sage-femme vient me prévenir que Julie arrive, elle est en train de mettre au monde un autre bébé juste à côté... Nous entendons d'ailleurs ses premiers cris quelques instants plus tard... Je dois rejoindre ma salle de naissance, elle m'y retrouvera... Je n'en peux plus, mais j'ai terriblement envie d'aller aux toilettes. Chéri m'y conduit, comme il peut... Heureusement car je me rends vite compte que je perds beaucoup de sang. C'est un peu la panique, chéri part chercher Julie.
"On va regarder ça" me dit-elle.
Je me traîne jusqu'à ma salle de naissance, la n°6. Je n'ai même pa envie qu'elle m'examine: je ne sais pas comment gérer les contractions couchée sur cette table. Mais il faudra que j'en passe par là pour avoir droit à la péri - qui soit dit en passant à intérêt à ne pas me lâcher sur ce coup-là... On ne peut quand même pas me faire le coup deux fois! Je n'imagine même pas comment les contractions pourraient être plus fortes, plus douloureuses, plus intenses ou plus rapprochées. Dieu bénisse la péridurale! Julie a intérêt à m'annoncer un minimum de 4 avec ce que j'endure, je n'ose pas en demander plus.
14H40
Julie examine enfin mon col. Je vois tout de suite à sa tête que le résultat n'est pas celui qu'elle escomptait.
"Eh bien, on ne peut pas dire que vous fassiez les choses à moitié, vous!"
Je suis interloquée, une seule question me hante:
"Combien????????"
"Vous êtes à 8!" me rétorque-t-elle avant de courir à la porte et de lancer:
"Je peux avoir quelqu'un? J'ai un 8 quasiment 9 ici"
"Dites-moi que j'ai le droit à la péri?????" Je crois que j'ai une idée de la réponse, mais je ne veux pas l'entendre.
Julie, elle, est déjà en train de sortir un tas de kits des placards et me répond sans même m'adresser un regard:
"On n'aurait pas le temps de la poser que bébé sera déjà là".
Je demande de l'oxygène, quelque chose. Je viens de passer les dernières heures à rêver cette maudite péri! On ne peut pas me faire ce coup-là maintenant!
14H50
Mon gynéco et Caroline font leur entrée. On me promet que bébé sera là bientôt. Caroline me félicite et rappelle que c'est ce que je voulais, j'ai assuré jusque là, sans péri, ce ne sera pas pire. On téléphone à bébé, histoire de voir comment il se porte. Caroline cherche et ne trouve pas le battement régulier du coeur de Sam. Cet instant me paraît durer une éternité, je croise les regards des sf et de gygy, le silence est absolu. Au final, Caroline trouve enfin la musique magique... Sam est plus bas que prévu. Tout va bien.
Je demande l'heure à mon mari. Il est 14H50. J'annonce clairement. Sam, tu as jusqu'à 15H15. Pas une minute de plus. On n'a pas le temps de poursuivre que je sens bébé s'engager très bas dans mon bassin. J'ai terriblement envie de pousser, Caroline me guide. Elle demande à chéri de se placer derrière moi pour m'aider et c'est très efficace. Les contractions me paraissent moins dures à supporter et je me concentre sur cette envie de pousser: Sam sera bientôt là, je veux que ça aille vite, et tout repose sur mes épaules (enfin les épaules, façon de parler). Je veux l'entendre, ce premier cri qui restera à jamais gravé en moi.
J'entends Julie parler d'épisio. Caroline lui interdit et la coache pour m'éviter le coup de ciseaux. 2 ou 3 poussées plus loin, il est là. Le premier cri emplit la salle et mon coeur chavire. C'est mon bébé, il est magnifique. Un peu violet, mais terriblement beau. Il a les yeux grands ouverts et nous avons à présent tout le temps de faire connaissance... Les sage-femmes nous félicitent, s'étonnent de sa taille, nous observons notre poussin, les yeux gourmands de découvrir chaque cm² de son petit être. Il est 15h12.
Bilan: A peine + de 4 h entre le début des contractions et la naissance de Samuel. 6 depuis la pose du gel. Un déclenchement sans perf ni péri. Je suis fière de moi. Je suis allée au bout, à la limite de ce que je pouvais supporter et par chance, c'était le bout de cette aventure. Mon petit homme est un beau pépère de 3kg670gr, 50 cm. Noah a fait de moi une maman, puisqu'il est mon premier fils. Samuel fait de moi une mère épanouie et comblée, qui sait déjà qu'elle vient de rencontrer le 3ème grand amour de sa vie. Tout au fond de mon être à l'instant même de sa naissance, se tissait déjà le lien sacré et indéfectible qui unit un enfant à sa mère. Il est, comme Noah et son père, ce qui compte le plus au monde à mes yeux. Amoureuse, moi???
1ère photo de notre petit Samuel Alexis Antoine
/https%3A%2F%2Fassets.over-blog.com%2Ft%2Fcedistic%2Fcamera.png)
/https%3A%2F%2Fstorage.canalblog.com%2F07%2F84%2F425456%2F48425318_o.jpg)
/https%3A%2F%2Fstorage.canalblog.com%2F81%2F54%2F425456%2F48426158_o.jpg)
/https%3A%2F%2Fstorage.canalblog.com%2F50%2F17%2F425456%2F48029642_o.jpg)